vendredi 20 mars 2015

Réforme du droit des sûretés mobilières

Mise en place d’un registre national des nantissements;
De nouvelles garanties pour plus de pouvoir d’emprunt;Un nouveau régime gouvernant les sûretés mobilières sera au menu d’un prochain conseil de gouvernement. La réforme bouleverserait certainement les habitudes actuelles. L’objectif de la réforme vise principalement à promouvoir l’accès des entreprises au financement, ainsi que la modernisation du droit applicable aux sûretés mobilières contenu au:
– Dahir formant Code des obligations et des contrats
– La loi n° 15-95 formant Code de commerce;
– La loi n° 15-97 formant code de recouvrement des créances publiques,
– La loi n° 1-72-184 du 27 juillet 1972 relative au régime de sécurité sociale;
Ainsi que la loi n° 17-99 portant code des assurances.
Les dispositions des articles 214, 283, 302, 377, 600, 609, 823, 839, 894, 1136 et 1141 du dahir formant Code des obligations et des contrats seront modifiées et complétées  par  la loi n° 18-15 qui s’appliquerait  à tous les biens mobiliers, tant corporels qu’incorporels. Elle impactera ainsi tout type de gage sur tout ou partie des actifs, tels que les stocks, les droits de propriété intellectuelle, les créances, etc.
La refonte touchera également la loi n° 15-95 formant Code de commerce, la loi n° 15-97 formant code de recouvrement des créances publiques, la loi n° 1-72-184 du 27 juillet 1972 relative au régime de sécurité sociale, ainsi que la loi n° 17-99 portant code des assurances, comme suit:
Code de commerce :
Les dispositions des articles 111, 114, 120, 122, 131, 136, 138, 143, 145, 529 et 531 de la loi n°15-95 formant Code de commerce sont modifiées ou complétées. L’article 109 sera dressé différemment après son abrogation.
Code des assurances:
Les dispositions de l’article 48 de la loi n° 117-99 portant Code des assurances seront également complétées.
Code de recouvrement des créances publiques :
Les dispositions des articles 105, 106, 108, 109, 111 du code de recouvrement des créances
publiques sont modifiées ou complétées.
La loi n° 1-72-184 du 27 juillet 1972 relative au registre de sécurité sociale:
Seules les dispositions de l’article 28 qui subiront une modification pour harmoniser le texte avec la loi 18-15
Les nouvelles garanties :
A l’instar de plusieurs législations modernes, les entreprises auront plus de possibilité pour  produire des garanties pour couvrir les crédits demandés aux banques. Par exemple, offrir l’ensemble de ses biens meubles comme garantie ou limiter cette dernière aux stocks et créances ou encore à un bien spécifique comme un véhicule ou une  machine. Ainsi, selon la nature de ces garanties, un rang sera fixé. Par exemple,  celui qui a offert tous ses biens meubles comme garantie à la banque attribuera le premier rang à la banque vis à vis celui qui a la garantie d’un bien spécifique ou la garantie sur les stocks et créances.
La mise en place d’un registre national des nantissements;
A l’instar de plusieurs législations moderne, le nouveau projet de loi veut mettre en place un registre des nantissements qui aura la mission d’informer les autres créanciers sur les inscriptions faites sur le bien mobilier donné en garantie et de fixer le rang des bénéficiaires d’un droit sur ledit bien.
Blog de Droit Marocain

mercredi 18 mars 2015

Le statut de l’auto-entrepreneur selon le projet de loi n° 114-13 : soutenable ?

L’obtention du statut se fera sur simple présentation de la C.I.N aux guichets de la Poste

Suivi: Le dahir n° 1.15.06 du 29 rabii II 1436 (19 février 2015) portant promulgation de la loi n°114-13 relative au sta­tut de l’auto-entrepreneur est publié au bulletin officiel du 12 mars 2015

Le 21 Janvier 2015, la se­conde Chambre du Parle­ment a voté à l’unanimi­té le projet de loi relatif à l’auto-entrepreneuriat.

La nouvelle loi vise à mettre en place un statut de l’au­to-entrepreneur, il s’agit d’un régime qui tend de contrôler l’économie informelle et inci­ter ses unités à s’orienter vers la légalité à travers des avan­tages juridiques, fiscaux, et sociaux. Ci-après les grandes lignes du projet :

Définition de l’auto-en­trepreneur :

L’auto-entrepreneur s’en­tend de toute personne phy­sique qui exerce, en son nom personnel, à titre individuel, une activité indépendante, basée sur sa propre force de travail, ses compétences, ou son savoir-faire pour géné­rer un revenu et qui exerce une activité commerciale, industriel, artisanale ou une prestation de service, dont le chiffre annuel est inférieur ou égal à :

– 500.000 dirhams, pour les activités commerciales, in­dustrielles et artisanales;

– 200.000 dirhams, pour les prestations de services.

Ces plafonds de chiffres d’affaires peuvent être modi­fiés par une loi de finances, ainsi le passage vers le ré­gime fiscal de l’entreprise individuelle «classique» dit personne physique se fera immédiatement, dès dépas­sement de ces seuils.

Seront exclues du régime d’auto-entrepreneur :

– Les personnes exerçant des professions exclues du régime du forfait en vertu du décret n° 2-08-124 du 3 jou­mada II 1430 ( 28 mai 2009)

– Les salariés du secteur pri­vé;

– Les personnes exerçant des professions libérales ré­glementées;

– Les fonctionnaires et les agents de l’État, des collecti­vités locales, des organismes et entreprises publiques et des personnes morales de droit public;

On comprend donc, que l’activité exercée sous le ré­gime d’auto entrepreneur ne peut être exercée qu’à titre principale et non à titre com­plémentaire contrairement au régime d’auto-entrepre­neur français qui donne les deux possibilités.

Un registre national des auto-entrepreneurs :

Il est tenu un registre natio­nal des auto-entrepreneurs, la forme et les règles de la tenue de ce registre, ainsi que les modalités d’inscrip­tion, de cessation d’activité, de radiation et de réinscrip­tion des auto-entrepreneurs seront fixées par un décret.

L’acquisition du statut de d’auto-entrepreneur :

Le statut de l’auto-entre­preneur est acquis suite à l’inscription de la personne éligible selon la définition donnée en-haut, et à la va­lidation de cette inscription par l’organisme désigné pour la gestion de ce statut. Cette inscription peut être réalisée par voie électronique après la mise en place d’une plate-forme électronique

La radiation du registre national des auto-entre­preneur :

Selon l’article 5 du projet, il est mis fin au statut d’au­to-entrepreneur par la radia­tion du registre national des autos-entrepreneurs. Cette radiation peut être faite à l’initiative de l’auto-entrepre­neur qui en fait la demande.

La radiation du registre national des auto-entrepre­neurs peut être également faite à l’initiative de l’orga­nisme visé à l’article 3 du projet si l’auto-entrepreneur :

– Déclare un chiffre d’af­faires annuel supérieur de 10 % à l’un des 2 seuils (500.000 dhs ou 200.000 dhs)

– Réalise un chiffre d’affaires annuel pendant 2 années consécutives supérieur à l’un des 2 seuils.

– N’informe pas l’organisme chargé de la tenue du re­gistre national des auto-en­trepreneurs, du changement d’adresse de domiciliation;

– Ne se conforme pas aux obligations prévue dans la loi n° 114-13

Le régime fiscal des au­to-entrepreneurs :

L’auto-entrepreneur bé­néficiera d’un régime fiscal spécifique et des avantages prévus par la législation fis­cale en vigueur.

Le régime fiscal spécifique sera fixé dans le cadre de la loi de finances. Ainsi, selon le projet du budget, ceux qui réalisent un chiffre d’affaires ne dépassant pas 500.000 Dhs dans les domaines com­mercial et industriel s’acquit­teront de l’IR (Impôt sur le re­venu) à un taux spécifique de 1%. Les auto-entrepreneurs qui totalisent un chiffre d’af­faires de 200.000Dhs seront soumis au taux de 2% pour le secteur des services. Ces dis­positions seront appliquées à partir de janvier 2015.

A noter que le projet de loi dispose également que les biens meubles et immeubles affectés à l’exercice de l’acti­vité de l’auto-entrepreneur ne peut en faire objet de saisie à raison des créances dues au titre des dispositions de la loi n° 114-13

Bon à savoir :

L’auto-entrepreneur sera soumis à toute les autres obligations légales et régle­mentaires notamment en matière fiscale, de protection du consommateur, du droit social, des règles d’hygiène et de sécurité et de qualifi­cation professionnelles re­quises pour l’exercice de cer­tains métiers

lundi 16 mars 2015

Le mécanisme national de prévention contre la torture, CNDH ou société civile?

Le Maroc doit installer prochainement un mécanisme national de prévention de la torture pour effectuer des visites dans les lieux de détention. C’est un organisme indépendant de toute autorité étatique au plan administratif, financier et de gestion ; le CNDH revendique le droit de le créer et de le gérer lui-même. La société civile revendique, elle, un mécanisme en dehors du CNDH, composé de personnalités indépendantes, crédibles et intègres.

Juste après la fin du deuxième Forum mondial des droits de l’homme réuni à Marrakech à la fin du moins de novembre dernier, et qui a vu éclater des divergences profondes entre le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) et nombre d’ONG défendant les droits humains, voilà un nouveau bras de fer qui s’annonce encore plus chaud entre les deux parties. L’objet de cette discorde est maintenant le mécanisme qui devrait être créé pour la prévention de la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Fin novembre dernier, l’Etat marocain a en effet déposé ses instruments de ratification auprès de l’ONU du protocole facultatif se rapportant à la convention internationale contre la torture, lequel protocole prévoit dans  son article 17 l’installation d’un Mécanisme national de prévention (MNP) de la torture dans un délai ne dépassant pas une année. C’est ce mécanisme qui est censé faire le suivi de l’application de cette convention et de son protocole.

Il aura même le droit d’effectuer des visites régulières et impromptues aux lieux de détention, l’un des moyens jugés selon l’Association de prévention de torture (APT) «les plus efficaces pour prévenir la torture et autres formes de mauvais traitements, dans le respect de la dignité humaine». L’APT, rappelons-le, est un organisme international qui aide les gouvernements, les systèmes judiciaires, les institutions des droits de l’homme et la société civile dans le monde entier à lutter contre la torture. Comment sera créé ce mécanisme ? Par décret ou par dahir ? De quels membres sera t-il composé ? Qui va s’en charger ? Qui va le financer ? Sur toutes ces questions, les points de vue du CNDH et de nombre d’associations des droits de l’homme sont loin d’être concordants. Avant d’exposer les uns et les autres, ce rappel des faits d’abord : c’est en 1993 que le Maroc a adhéré à la Convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, mais ce n’est qu’après dix ans, soit en février 2013, qu’il ratifie le protocole facultatif se rapportant à cette convention. C’est le trentième pays dans le monde et le seul pays arabe à l’avoir fait. Il a fallu en effet la création du CNDH en 2011  et son travail de sensibilisation, pour que le Parlement marocain finisse par voter ce protocole (publié au Bulletin officiel N° 6166 du 4 juillet de la même année 2013).
Ce mécanisme aura-t-il un pouvoir exécutif ? Rien n’est moins sûr…

Il faut dire que sur ce MNP, et avant même que le Maroc envoie ses émissaires pour déposer ses instruments de ratification du protocole facultatif complétant la Convention de lutte contre la torture, un débat est ouvert depuis déjà quelques années, aussi bien par le CNDH que par la société civile. Cette dernière s’est même créé un collectif composé d’une douzaine d’ONG (entre autres l’AMDH, la Ligue marocaine de défense des droits humains, le Forum vérité et justice, l’Association Adala…), et organisé des ateliers de réflexion dans l’objectif de faire des recommandations sur ce sujet. Et ce débat «a bien avancé», se félicite Mohamed Nachnach, président de l’Organisation marocaine des droits humains (OMDH), membre de ce collectif.

D’ailleurs, une réunion de ce dernier est prévue ce 12 décembre pour rédiger son point de vue sur ce mécanisme et l’envoyer aux autorités compétentes. M. Nachnache et Abdelilah Benabdesslam, vice-président de l’AMDH, nous le résument de la façon suivante: «Le Mécanisme national de prévention devrait être une institution indépendante de toute autorité étatique, et même du CNDH, qui pourrait y être lui-même représenté par ailleurs. Il doit être composé de personnalités marocaines crédibles, indépendantes et intègres». Le CNDH n’est-il pas une institution indépendante de par même les principes de Paris? Il pourrait l’être, répond M. Nachnache, «mais de par ses statuts, il ne pourrait créer et héberger lui-même ce mécanisme, encore moins le mettre sous sa coupe. Sauf s’il veut modifier ses statuts, le cas échéant, il perdrait toute crédibilité. Le rôle de ce conseil est purement consultatif et non exécutif.

Il pourrait effectuer des visites des lieux de détention et rédiger des rapports thématiques, faire des recommandations, mais il ne pourra pas prendre des décisions si jamais il y a constatation de torture et mauvais traitements dans les centres de détention». Vraiment, ce MNP aura-t-il un pouvoir exécutif et non pas seulement, comme celui du CNDH, un pouvoir de consultation et de proposition? Rien n’est moins sûr. Et le protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, le dit lui-même. Dans son article 20, il stipule que les mécanismes nationaux de prévention sont investis de trois attributions : primo, examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté se trouvant dans les lieux de détention, en vue de renforcer, le cas échéant, leur protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Secundo : formuler des recommandations à l’intention des autorités compétentes afin d’améliorer le traitement et la situation des personnes privées de liberté et de prévenir la torture, compte tenu des normes pertinentes de l’Organisation des Nations Unies. Tertio : présenter des propositions et des observations au sujet de la législation en vigueur ou des projets de loi en la matière. Il n’est nulle part fait allusion dans ce texte d’un quelconque pouvoir exécutif.
Néanmoins, il est toujours possible, comme cela se fait partout dans les pays ayant ratifié le protocole facultatif, et comme le souhaite ce collectif d’ONG, de créer un Mécanisme indépendant de l’institution nationale chargée de la promotion des droits de l’homme, qui est le CNDH au Maroc.

Que dit le gouvernement sur ce sujet ? Il semble que la question n’est pas encore tranchée. Mustapha Ramid, ministre de la justice et des libertés, lors des questions orales à la Chambre des représentants du mardi 3 décembre, ne sait lui-même pas encore : «Ce nouveau mécanisme, a-t-il affirmé, sera soumis soit au CNDH, soit à une commission indépendante au plan administratif et financier».
Le CNDH candidat potentiel
Que dit le CNDH ? Il penche plutôt vers la première alternative. A son actif il y a déjà une étude sur le sujet, bien exhaustive, où le conseil se considère «parmi les candidats potentiels susceptibles de jouer le rôle de mécanisme national de prévention» (Voir questions à M. Essabbar). La loi créant le CNDH l’a en effet prévu dans son article 10, mais seulement en tant que contributeur «à la mise en œuvre des mécanismes prévus par les Conventions internationales relatives au droit de l’homme et les protocoles additionnels ou facultatifs que le Royaume ratifie ou auxquels il adhère».

Certes, ce conseil a suffisamment d’expérience pour chapeauter un tel MNP, mais il n’est pas souhaitable, comme l’espère le collectif d’ONG contre la torture, que cette «institution nationale dédiée aux droits de l’homme d’une façon générale soit directement impliquée dans sa gestion, son agenda de travail et son financement». En tout cas, dans l’étude comparative du CNDH sus-évoquée, ce MNP, doit être établi en vertu d’un texte constitutionnel ou législatif. C’est ce dernier qui devra fixer le processus de nomination des membres, la fonction, le mandat, les pouvoirs et les responsabilités du mécanisme, le mode de financement, les immunités et privilèges. Il souhaite même que ce MNP soit constitutionnalisé.
«Une base constitutionnelle devrait être privilégiée à un seul ancrage législatif pour accroître la pérennité du mécanisme», préconise cette étude (voir encadré). Maintenant une question importante se pose: comment ce MNP pourra-t-il contrôler ce qui se passe dans les commissariats pour savoir s’il y a ou non torture et traitements inhumains et dégradants ?

Au fait, le protocole facultatif se rapportant à la Convention internationale contre la torture ne se limite pas aux seules prisons, mais il étend le contrôle de ce mécanisme à tout lieu où il y a «placement d’une personne dans un établissement public ou privé de surveillance dont elle n’est pas autorisée à sortir de son gré, ordonné par une autorité judiciaire ou administrative ou toute autre autorité publique».
Autrement dit, les hôpitaux psychiatriques et les entres de sauvegarde pour les enfants, pour ne parler que de ceux-là, sont aussi concernés. Faut-il installer des caméras dans tous ces lieux pour savoir s’il y a ou non torture ? Ou faudra-t-il se contenter de simples visites et de collecte de témoignages ? Une chose est sûre, plusieurs pays ayant installé ce MNP ont été obligés de les installer dans leurs prisons et salles d’interrogatoire. Par expérience, ce système a permis dans ces pays une diminution de 80% des cas de torture.
Le Maroc le fera-t-il aussi? Il n’est pas impossible si l’ont en croit les déclarations de Driss El Yazami, président du CNDH. Mais signalons que d’ores et déjà l’une des mesures phare prévues dans le code de la procédure pénale préparée par le gouvernement concerne les enregistrements audiovisuels des interrogatoires des suspects et des accusés. Le prochain MNP aura-t-il accès à tout cela au même titre que les tribunaux? Il faudra attendre d’abord sa mise en place pour le savoir.

Protection des enfants : l’UNICEF interpelle le Maroc

La Convention internationale des droits de l’enfant a 25 ans. L’UNICEF publie un rapport sur la situation de l’enfance dans le monde. 15 % des enfants dans le monde travaillent, 11% des filles sont mariées avant l’âge de 15 ans, violence, traitements cruels et dégradants… Le Maroc enregistre quelques avancées, mais il existe encore des défaillances: déperdition scolaire, pédophilie, exploitation sexuelle des mineurs, travail des enfants, mendicité…

A l’occasion de la célébration du 25e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) en ce 20 novembre 2014, l’UNICEF a rendu public un rapport exhaustif sur le degré d’application de cette convention dans le monde, dont plusieurs pages sont consacrées au Maroc. Dans les quatre domaines qui constituent l’essence même de la CIDE, et sur la base desquels cette évaluation a été établie, à savoir le droit à l’éducation, à la santé et la survie, à la protection et le droit à la participation, le Maroc enregistre quelques avancées, mais il reste encore quelques défaillances. Notre pays a ratifié la CIDE depuis 1993, et a installé, une année plus tard, un Observatoire national des droits de l’enfant (ONDE), instrument de suivi et de mise en œuvre de la Convention onusienne.

De même, en 2006, il a adopté à l’échelon gouvernemental un Plan d’action national pour l’enfance 2006-2015 (PANE), plan élaboré en concertation avec la société civile. La dernière initiative gouvernementale en date dans le domaine de la protection des enfants  est la nouvelle «Politique publique intégrée de protection de l’enfance au Maroc» élaborée par le ministère de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social (MFFDS), et dont les grandes lignes ont été annoncées en ce début 2014 (au même moment où se tenaient les premières Assises sur la protection de l’enfance.) Laquelle «nouvelle politique» s’est fixée six objectifs stratégiques. Le but ultime étant de «garantir à tous les enfants du Maroc une protection effective et durable contre toutes les formes de violence, d’abus, d’exploitation et de négligence».
Mais, concrètement, vingt- et-un ans après la ratification de la CIDE, qu’a fait le Maroc pour que ses enfants soient en bonne santé, pour qu’ils bénéficient d’un enseignement de qualité, pour qu’ils vivent en sécurité et pour qu’ils soient protégés contre toutes les formes de maltraitance et d’exploitation ?
Donnons d’abord un aperçu sur la situation des enfants dans le monde telle que présentée par le rapport de l’organisme onusien.
Force est de reconnaître que des progrès considérables, note l’UNICEF, ont été accomplis ces 25 dernières années. Quelques chiffres : 90 millions d’enfants seraient morts si les taux de mortalité étaient restés à leur niveau de 1990, ils ont au contraire pu vivre au-delà de 5 ans. Le nombre de décès dus à la rougeole chez les enfants de moins de 5 ans a chuté de 482 000 en 2000 à 86 000 en 2012, en grande partie grâce aux progrès de la vaccination, dont le taux est passé de 16% en 1980 à 84% en 2012. L’UNICEF enregistre aussi une chute de 37% des retards de croissance depuis 1993, les enfants mangent mieux. Même chose au niveau de la scolarité dans le primaire, et «même dans les pays les moins avancés: alors qu’en 1990, seulement 53% des enfants étaient admis à l’école, le taux atteignait 81% en 2011».

Mais l’on déchante vite en méditant bien les tableaux et les graphes préparés par l’UNICEF à l’occasion de ce 25e anniversaire de la CIDE. Voilà quelques chiffres qui interpellent encore les gouvernements dans le monde, les ONG et les institutions internationales: 6,6 millions d’enfants de moins de 5 ans sont morts en 2012, «la plupart de causes évitables, les privant de leur droit fondamental de survivre et de se développer». 15% des enfants dans le monde travaillent, «ce qui compromet leur droit à être protégés contre l’exploitation économique et porte atteinte à leur droit d’apprendre et de jouer».

Le bilan santé est jugé positif

Autre chiffre qui donne encore froid au dos : 11% des filles sont mariées avant l’âge de 15 ans, «mettant en péril leurs droits à la santé, à l’éducation et à la protection». Les enfants dans le monde subissent aussi, quotidiennement, alerte l’UNICEF, des traitements cruels et dégradants, que ce soit à la maison ou à l’école, «ils sont soumis à une discipline imposée par la violence».

Nuance: sur tous ces registres, les enfants dans le monde ne sont pas logés à la même enseigne, leurs chances, remarque le rapport de l’UNICEF, «diffèrent selon que le pays est riche ou pauvre, qu’ils sont nés filles ou garçons, dans des familles fortunées ou démunies, à la campagne ou en ville, et là aussi, selon qu’ils vivent dans des zones aisées ou des quartiers défavorisés».
C’est exactement ce qui prévaut au Maroc : les droits à l’éducation, la santé, la protection et la participation de l’enfant sont fonction de son milieu social, économique  et géographique. Dans ces quatre domaines qui articulent la CIDE, quelques avancées sont enregistrées, et l’arsenal juridique encadrant tous ces droits est copieux, et va même en s’améliorant d’année en année, mais l’application sur le terrain bute sur nombre d’obstacles, tant financiers, politiques, sociaux que culturels. Les ONG des droits de l’homme, et même l’ONDE, ne cessent de tirer la sonnette d’alarme sur la déperdition scolaire, la pédophilie, l’exploitation sexuelle des mineurs, le travail des enfants de moins de 15 ans, celui des petites «bonnes» dans les maisons, la violence dans les écoles, les enfants de la rue et la consommation de drogues devant les établissements scolaires.

Commençons d’abord par le premier volet, celui du droit à l’éducation. On connaît le tableau, et l’UNICEF le brosse ainsi. Une percée remarquable au niveau de la première année du primaire, avec une moyenne nationale de 99,5% de taux de scolarisation. Néanmoins, cet effort au primaire n’est pas capitalisé au niveau des différents cycles. «Un taux de déperdition important est enregistré d’un cycle à l’autre, ramenant la moyenne nationale de scolarisation à 87,6% au collège et à 61,1% au lycée». S’il y a iniquité dans ce domaine, elle touche essentiellement les enfants en milieu rural, les filles notamment et les enfants en situation de vulnérabilité.
Deuxième volet, celui de la santé : l’UNICEF salue le lancement par le Maroc de plusieurs stratégies pour la santé dont la nouvelle politique 2012-2016, le plan d’action pour la santé 2012-2019, le plan d’action pour la santé de l’enfant 2012-2019, ainsi que la Stratégie nationale de nutrition 2011-2019.

Inégalités et iniquité en matière de santé entre les villes et les campagnes, les riches et les pauvres

Le bilan est jugé positif, volet santé, «d’un point de vue épidémiologique», mais des lacunes subsistent. Le taux de mortalité infantile est passé, c’est vrai, de 75,5% en 1987 à 30% en 2010, et le quotient de mortalité infanto-juvénile est passé de 104% en 1987 à 36% en 2010. De même pour la malnutrition des enfants : elle a baissé entre 2004 (18%) et 2011 (15%). Mais l’organe onusien remarque notamment des inégalités et une certaine iniquité en matière de santé entre les villes et les campagnes, tant celle de la mère que celle de l’enfant. «La mortalité infantile est plus importante que la moyenne nationale chez les pauvres en milieu rural : elle est de 45% plus élevée pour les 20% les plus pauvres, par rapport aux 20% les plus riches».

Troisième volet, la protection de l’enfance, et c’est là que le bât blesse. Beaucoup de retard à rattraper. Il n’est pas besoin de citer le rapport de l’UNICEF pour avoir une idée sur le degré de protection dont bénéficient nos enfants. La commission ministérielle de l’enfance, présidée par le chef du gouvernement, qui a préparé la nouvelle «Politique publique» courant 2013, en a fait elle-même un état des lieux. Elle constate «une évolution croissante» des phénomènes d’abus, de violence et d’exploitation des enfants: abus et violence physique, psychologique et/ou sexuel au sein des familles, des écoles, des institutions, dans la rue ; exploitation des enfants dans le travail (petites bonnes, secteur informel), dans la mendicité, dans la vente de drogues, dans la délinquance ; exploitation des enfants à des fins sexuelles dans la prostitution, le tourisme, sur Internet.

L’UNICEF, dans son rapport, en fait aussi un état des lieux.
Dernier volet de la CIDE: le droit des enfants à la participation. Sur ce plan, l’UNICEF note nombre de défaillances : faible participation des enfants et adolescents aux médias, absence d’une stratégie dans le domaine, absence de dialogue, normes sociales peu favorables à cette participation. En conséquence, souligne le rapport de l’UNICEF, «les parents n’acceptent d’aborder que de rares sujets de discussion avec leurs enfants, les sujets profonds intéressant les adolescents et enfants étant frappés d’interdiction. Cette situation laisse très peu de place aux enfants et à l’expression de leurs opinions». En conclusion, sur ce volet de la participation, le rapport reproche au Maroc «l’absence d’une approche transversale et intégrée de la participation au niveau des politiques et stratégies de participation nationale et locale», et la faible capacité de plaidoyer des associations.

La nouvelle politique de protection de l’enfance de Bassima Hakkaoui

La nouvelle «Politique publique intégrée de protection de l’enfance au Maroc» a été préparée par le ministère de la solidarité, de la femme, de la famille et du développement social (MFFDS) durant plus d’une année (2013), précisément par une commission ministérielle de l’enfance présidée par le chef du gouvernement. Elle est venue dans la foulée de la Constitution de 2011, l’adhésion du Maroc en 2013 au 3e protocole de la CIDE relatif à la procédure de communication, ainsi qu’à la Convention européenne de Lanzarote sur la protection des enfants contre les abus et l’exploitation sexuels. Cette nouvelle politique, avait annoncé le ministère, «vise à mettre en place un environnement protecteur durable des enfants contre toutes les formes de négligence, d’abus, de violence et d’exploitation. Elle permettra au Maroc de disposer d’un cadre de protection des enfants en conformité avec les principes et dispositions de la Constitution ainsi que des différents instruments internationaux qu’il a ratifiés». Et, in fine, elle «permettra la mise en place de systèmes intégrés de protection efficaces et aisément accessibles à tous les enfants». Elle s’est fixé six objectifs, dont l’intégration de la protection des enfants «dans toutes les politiques et programmes publics», une façon d’uniformiser le travail dans le domaine de l’enfance de tous les ministères, les administrations et les institutions (INDH, CNDH, Conseil consultatif de la famille et de l’enfance…), et une façon d’articuler cette politique aux autres politiques nationales (lutte contre la pauvreté, développement humain…) et sectorielles (justice, santé, éducation, jeunesse, travail, sécurité…).

Rapport de l’UNICEF : quelques chiffres frappants

  • 39% des personnes vivant dans des ménages ruraux au Niger ont accès à une source améliorée d’eau potable, contre 100% des ménages urbains.
  • 4% des naissances sont déclarées chez les Tanzaniens les plus pauvres contre 56% chez les plus riches.
  • Au Burkina Faso, 76% des filles et des femmes (entre 15 et 49 ans) ont subi une MGF/E (mutilations génitales féminines) mais seulement 9% sont favorables à la poursuite de cette pratique.
  • 18 000 enfants de moins de 5 ans meurent chaque jour dans le monde, à cause de manque de services à cause la pauvreté ou de la situation géographique.
  • Si 2,1 milliards de personnes supplémentaires dans le monde ont accès depuis 1990 à une eau potable améliorée, de nombreux habitants des zones rurales ne bénéficient pas de ce progrès. Ils représentent moins de la moitié de la population mondiale mais constituent 83% de ceux qui sont encore privés d’une source fiable d’eau potable.

JAOUAD MDIDECH. La Vie éco

Leila Bouasria : «Cette migration autonome va au-delà de l’aspect économique et résulte d’une multitude de facteurs»

Questions à, Leila Bouasria sociologue et coordinatrice de l’étude collective.

La Vie éco : L’idée d’émigrer vers les villes est un projet autonome, individuel, non dicté par les parents, mais les causes ont toujours été les mêmes, améliorer ses conditions de vie…

Dans cette étude collective, nous avons justement tenté de décrire les motivations et stratégies mobilisées par les migrantes durant leurs itinéraires migratoires. Les différentes données ont démontré que cette migration autonome va au-delà de l’aspect économique et résulte d’une multitude de facteurs. Certains sont, bien entendu, liés à la précarité dans les milieux d’origine, donc le projet migratoire est effectivement conçu comme une condition de survie. Nous avons repéré plusieurs événements qui fragilisent les foyers et incitent au départ comme les accidents de vie (maladie ou décès des parents, chômage), divorce ou conflits familiaux. Par ailleurs, le départ peut aussi être une stratégie de fuite d’un environnement où elles disent subir une discrimination ou une exploitation. Certaines se plaignent de l’absence de liberté associée aux normes sociales préétablies et qui se manifestent plus fortement dans des milieux communautaires d’interconnaissance. Celles qui sont célibataires ou divorcées racontent également l’expérience du stigma social et tentent de reconstruire ailleurs un nouveau statut loin des cadres figés que leur dicte une division de rôles rigide et prévisible. Il ne faut pas oublier que ces migrantes avant de partir sont aussi exposées aux modèles féminins de migration qui ont réussi ou aux médias (feuilletons, films, publicité…) qui leur renvoient des conditions de vie plus intéressantes en ville. Elles aspirent donc à tenter l’expérience urbaine et à changer de mode de vie.

On n’est plus dans la victimisation, mais dans la construction d’une individualité, quand même, ces femmes sont en quelque sorte victimes d’une société machiste… Sans dire que l’individualité dans la société marocaine a du mal à s’affirmer…

Nous avons effectivement beaucoup discuté au sein du groupe de cette question d’autonomie face à la précarité. Nous précisons justement qu’éviter la victimisation ne veut pas dire faire l’impasse sur les conditions sociales/économiques précaires dont souffrent ces migrantes mais il s’agit d’éviter d’analyser les données à partir d’une grille de lecture misérabiliste qui réduit leur vie à ces difficultés en occultant leurs capacités de résistance. Tous les membres de notre équipe, à travers leurs analyses, tentent de faire ressortir les luttes quotidiennes et les compétences de ces femmes. Ces migrantes une fois à Casablanca, sont propulsées dans des réseaux extra-familiaux, ce qui contribue à la construction de leur autonomie. Elles cherchent, en mobilisant plusieurs ressources et stratégies, à créer les moyens de leur insertion sociale (trouver un travail, un logement, gérer l’habitat collectif avec tous les problèmes qu’on analyse dans cette étude…), elles doivent en quelque sorte s’assumer, se débrouiller. La ville est le lieu par excellence où se déploient justement ces savoir-circuler et ces subjectivités.

Il n’est nullement fait état dans l’étude de la prostitution de ces filles, pourtant ces émigrantes sont nombreuses à le faire, ne serait-ce que pour arrondir leur fin de mois…, est-ce la honte qui les empêche d’en parler ?

Certaines en parlent dans leurs entretiens, d’autres ne le font pas justement parce qu’elles ont peur d’être jugées, mais beaucoup de migrantes ne se retrouvent tout simplement pas dans ce genre de situation. Et là je veux m’arrêter sur un point très important. Il s’agit de distinguer entre les représentations que les gens se font de cette migration autonome et la réalité. Souvent pour les gens du douar, la fille qui a migré (kherjate/ sans oublier que le «khrouj» a justement une connotation de prostitution) voit sa réputation ternir et ses projets de mariage compromis justement à cause de cette association entre le départ (seule) et la débauche ou la déviance.
D’ailleurs, il y a des termes qui qualifient les migrantes et qui sont de connotation péjorative comme ‘hariba/hergaouiya/mouhajira’ qui laissent entendre qu’elles sont en position de fuite ou de clandestinité, qu’elles partent pour cacher quelque chose et faire ce qu’elles veulent loin du contrôle des siens. Beaucoup sont tout simplement à Casablanca pour travailler, chercher à améliorer leurs situations ou vivre une vie meilleure. Si on associe à chaque fois la migration des femmes seules à la prostitution, nous risquons de reproduire les dispositions traditionnelles relatives à la mobilité des femmes.

JAOUAD MDIDECH. La Vie éco

L’expérience d’une Académie régionale d’éducation racontée par son directeur

Etablissements publics dotés de la personnalité juridique, les Académies régionales d’éducation et de formation ont-elles pu, 12 ans après la nomination de leurs directeurs, assumer cette autonomie ?

C’est le gouvernement qui trace les grandes lignes de sa politique éducative et les décline sous forme de projets, ce sont les Académies régionales d’éducation et de formation (AREF) qui sont chargées de leur mise en œuvre au niveau local. Cela s’appelle décentralisation-déconcentration des pouvoirs. C’est en 2000 qu’un dahir a fixé le nouveau statut juridique de ces académies, il les a érigées en établissements publics dotés de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, et les a chargées de «la mise en œuvre de la politique éducative et de la formation, compte tenu des priorités et des objectifs nationaux établis par l’autorité de tutelle». Mais que sait-on exactement de cette expérience des AREF, voilà 12 ans que leurs 16 directeurs (correspondant aux 16 régions du pays) ont été nommés ? Ces derniers ont-ils pu assumer en toute autonomie, comme le stipulent les textes juridiques, la gestion régionale de la politique d’éducation et de formation dictée par l’Etat au niveau central? Tijania Fertat, la directrice de l’AREF de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër (RSZZ), vient de livrer son témoignage dans un livre intitulé «Pour une décentralisation éducative»*, sur les dix ans qu’elle a passés à la tête de cette AREF, l’une des plus importantes du Royaume. Cette académie c’est en effet un demi-million d’élèves,

20 000 fonctionnaires, 650 établissements d’enseignement public, 383 établissements privés.

Un budget qui a atteint en 2008-2009, grâce au renflouement du plan d’urgence, plus de 630 MDH. C’est dire que la tâche n’était pas aisée pour elle, et l’auteur de reconnaître d’emblée dans l’introduction à ce travail que l’exercice de cette autonomie n’a pas été de tout repos.

Que tout dépend de la personnalité du directeur de l’Académie, mais aussi de la volonté du centre à Rabat, à savoir le ministère de tutelle, de laisser exercer ou non cette autonomie : son espace «s’élargissait, rétrécissait ou disparaissait selon les décideurs politiques et selon la vision et la capacité du directeur à tracer les limites de cette autonomie», annonce sans détour l’auteur (voir entretien). Armée d’une riche expérience en tant qu’inspectrice de philosophie, mais aussi de son passage à la tête de la délégation de Moulay Rachid-Sidi Othmane à Casablanca, la directrice de l’Académie de Rabat et région a fait siennes deux devises dans la gestion de cet établissement public : un travail d’équipe avec ses collègues, et le partage de sa vision avec ses collaborateurs pour une meilleure approche des problèmes.

L’enseignant est le pivot du système éducatif, sa formation et son recyclage sont indispensables

Cette autonomie de gestion en équipe a démarré pour elle d’abord au niveau de ce qu’elle a appelé la «rationalisation» des ressources financières de l’Académie. Non sans succès. A commencer par la consommation de l’eau et de l’électricité. Chiffres et tableaux à l’appui, Mme Fertat se félicite que la dette de la REDAL, grâce à un système de vérification informatique qu’elle a installé et qui élimine des anomalies et des chevauchements, a substantiellement baissé durant son mandat de dix ans. Elle est passée de 43 à 23 MDH.

Toujours dans la même logique de rationalisation des ressources, la directrice de l’Académie a opté pour certains travaux, comme ceux d’étanchéité des établissements, pour le marché au rabais comme mode d’appel d’offres. Les gains étaient intéressants.

La gestion d’une AREF ne doit pas, en principe, et selon le principe de l’autonomie régionale, être à la charge exclusivement du seul ministère de l’éducation nationale (MEN). Si son directeur peut tisser des liens de partenariat avec le monde économique et les agences de développement et gagner quelques centaines de milliers de dirhams, personne ne l’en empêche, de par même son statut. Autant d’ailleurs que le président d’une université. C’est ce qu’a essayé (comme elle le raconte) Mme Fertat, en sauvant du délabrement quelques établissements scolaires, après avoir mené une campagne de sensibilisation sur le sujet, autour de photos «choquantes» d’établissements, jugés dans un état de «délabrement avancé». Pour ce faire, la directrice a signé des conventions avec la préfecture et la municipalité de Salé, mais aussi avec l’ADS pour le branchement de 36 écoles à Salé, avec un budget de 1,8 MDH. «Suite à cette convention, l’ADS a créé un fonds d’aide pour l’AREF, dont l’objectif était la réhabilitation des espaces scolaires», se félicite la directrice. En 2008, ajoute-t-elle, grâce à ces partenariats, «la situation des établissements fut améliorée, mais le besoin en réhabilitation était grand, et nécessitait des moyens financiers énormes». Ces moyens, le plan d’urgence décrété sous Ahmed Akhchichine, une année plus tard, va les apporter. De près de 181 MDH en 2006-2007, le budget de l’AREF de RSZZ est passé à plus de 632 MDH en 2008-2009. Ce qui lui a permis le renouvellement du mobilier de bureau des établissements scolaires. Mais pas de n’importe quelle manière, elle l’a fait de sorte qu’il soit plus esthétique pour apporter de la gaité dans les classes. Un produit plus résistant, et de fabrication marocaine pour réduire la facture. «Le tableau que l’école a toujours utilisé, en contreplaqué, est fragile et ne résiste pas aux aléas du temps ni au vandalisme. Les arrières cours regorgent de tableaux détériorés et inutilisables», se désole la directrice.

Une autre initiative de la directrice de cette Académie, qui dénote elle aussi d’une volonté d’innovation et d’autonomie pour tout le bien de l’école publique marocaine: le développement de partenariats, non seulement avec des organismes marocains, mais aussi étrangers. Pour améliorer la qualité de la vie scolaire et encourager de l’animation, l’Académie a lancé un ambitieux projet de création au sein de chaque établissement scolaire d’un «Centre d’animation, de documentation et d’information pédagogique (CADIP)». Des lieux de consultation documentaire, mais aussi d’animation et de formation à la recherche documentaire. Il fallait donc des professeurs-animateurs formés à cette tâche, capables d’animer diverses activités. Grâce à la coopération inter-académique qui la lie à l’Académie de Lyon, l’Académie de Rabat et région a envoyé en France, en 2009, un groupe de professeurs pour des visites d’étude et de stage. La courtoisie est rendue, puisque des professeurs de Lyon ont été invités à animer des sessions de formation à Rabat. Dans quatre sphères d’activité : le pédagogique, l’éducatif, le culturel et le social.

En faisant cela, la directrice est consciente que l’apprenant, dans n’importe quel domaine, fût-ce celui de l’animation culturelle, est au centre du système éducatif. Pour elle, et l’expérience du plan d’urgence l’a démontré, les seuls moyens financiers ne suffisent pas pour améliorer la qualité de l’école publique marocaine.

En conclusion au chapitre qu’elle a consacré à ce plan d’urgence dans son livre-bilan-témoignage, elle considère que l’élément humain est le pivot de tout le processus de formation, et sa «mise à niveau préalable, à même de supporter et de conduire toute réforme», est fondamentale. Au-delà de l’autonomie des AREF, elle appelle ainsi à une «habilitation à la fois professionnelle et éthique des agents de la réforme que sont les gestionnaires et les enseignants». En cela, Mme Fertat rejoint l’appel du Conseil supérieur de l’enseignement et de l’actuel ministre de l’éducation nationale. Les deux appellent à la formation et au recyclage de l’enseignant, pour qu’il devienne un vrai éducateur, un vrai pédagogue.

Editions Hammouch, 260 pages,
préface de Abdellah Saâf

mercredi 4 mars 2015

La police a confisqué mon permis de conduire

En empruntant un sens interdit, j’ai heurté légèrement un piéton qui est resté allongé par terre, alors qu’il n’avait pratiquement rien. Il n’y avait aucun tableau signalant l’interdiction. C’est après coup que l’on m’a informé qu’il avait été arraché. La police m’a tout de même retiré mon permis de conduire et jusqu’à présent, il ne m’a pas été restitué. Je n’ai aucune information sur ce dossier et, plus inquiétant, je n’ai plus revu le policier qui a fait le constat. Que devrais-je faire ? Le permis est un document important pour moi puisque je suis un commercial de profession et que je ne peux pas exercer mon métier sans ce permis.

L’assureur refuse d’indemniser un sinistre

Je suis couvert par une compagnie d’assurance et ce pendant plus de cinq ans, aucun sinistre n’avait été enregistré à mon compte. Je vous saisis pour deux petites questions. La première, c’est qu’à la souscription de mon contrat automobile, j’ai payé une prime pour trois garanties : la responsabilité civile, la défense et recours et la garantie dite tout risque. Entre temps, j’ai dû vendre ma voiture pour en acheter une autre, et j’ai demandé à la compagnie de procéder au transfert de mon assurance sur ma nouvelle voiture. Seulement, on a oublié de me souscrire le contrat tout risque. Omission à laquelle je n’ai pas non plus fait attention. Quand j’ai eu un accident, mon assureur a rejeté la facture et refusé de m’indemniser sous prétexte que je ne suis pas couvert. Que devrais-je faire ? Ma deuxième question est de savoir si le bonus de 10% sur la prime d’assurance n’est pas accordé pour chaque année au cours de laquelle je n’ai pas enregistré un accident.

Ma banque a effectué une opération à mon insu

J’ai souscrit une assurance vie auprès d’une compagnie d’assurance par le biais de ma banque. Il y a quelques mois, je suis tombé gravement malade avant d’être licencié. Du coup je me trouve dans l’impossibilité de payer ma prime d’assurance vie puisque mon compte est vide. Dernièrement, j’ai reçu une mise en demeure émanant d’un avocat qui représente ma banque, me demandant de m’acquitter de la somme de 15 000 dirhams vis-à-vis de la banque. A défaut, je risque des poursuites judiciaires et la saisie de mes biens. Je me suis présenté à la banque pour connaître l’origine des 15 000 DH dont je suis débiteur. Il m’a été expliqué qu’elle a payé sur mon lieu et place en prélevant de mon compte les sommes qui correspondent à la prime d’assurance sans m’en informer et sans mon autorisation. La banque en a-t-elle le droit et que devrais-je faire pour protéger mes droits ?

lundi 2 mars 2015

La loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés

La nouvelle loi est publiée au B.O;
Les produits des banques islamiques;
La nouvelle loi n° 103-12 est publiée au bulletin officiel du 22 janvier 2015 (Édition en arabe) et B.O du 5 mars 2015 (Édition de traduction officielle)
Il s’agit de la loi qui intègre les banques islamiques dans l’économie nationale par l’instauration d’un cadre législatif (art. 54 au 70) régissant l’activité de ces banques qui sont maintenant désignées officiellement par les banques participatives.
Selon le texte de la loi 103-12, les banques participatives sont les personnes morales régies depuis le 22 janvier 2015, date de la publication au bulletin officiel, par les dispositions de la loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés et qui exerceront :
– les activités visées aux articles 55 et 58,
– les opérations commerciales, financières et d’investissements, après  avis conforme du Conseil supérieur des Ouléma¸
– la réception du public des dépôts d’investissement dont la rémunération est liée aux résultats des investissements convenus avec la clientèle.
Les banques participatives peuvent procéder au financement de la clientèle à travers notamment de plusieurs produits. Il s’agit :
Salam : tout contrat en vertu duquel l’une des deux parties, banque participative ou client, verse d’avance le prix intégral d’une marchandise dont les caractéristiques sont définies au contrat, à l’autre partie qui s’engage à livrer une quantité déterminé de ladite marchandise dans un délai convenu.
Istisna’a : tout contrat d’acquisition de choses nécessitant une fabrication ou une transformation en vertu duquel l’une des deux parties, banque participative ou client, s’engage à livrer la chose, avec des caractéristiques définies et convenues, fabriquée ou transformée, à partir des matières dont il est propriétaire, en contrepartie d’un prix fixe dont le paiement s’effectue par l’autre partie (moustasniî) selon les modalités convenues.
Mourabaha :
Il s’agit de tout contrat par lequel une banque participative acquiert un bien meuble ou immeuble en vue de le revendre à son client à son coût d’acquisition plus une marge bénéficiaire convenue d’avance.
Le règlement de cette opération par le client est effectué selon les modalités convenues entre les parties.
Ijara :
Il s’agit tout contrat selon lequel une banque participative met, à titre locatif, un bien meuble ou immeuble déterminé et propriété de cette banque, à la disposition d’un client pour un usage autorisé par la loi. L’Ijara peut revêtir l’une des deux formes suivantes :
– Ijara tachghilia qui consiste en une location simple;
– Ijara wa iqtinaa qui consiste en une location assortie de l’engagement ferme du locataire d’acquérir le bien loué à l’issue d’une période convenue d’avance.
Moucharaka :
Il s’agit de tout contrat ayant pour objet la participation, par une banque participative, à un projet, en vue de réaliser un profit. Les parties  participent aux pertes à hauteur de leur participation et aux profits selon un prorata prédéterminé. La Moucharaka peut revêtir l’une des deux formes suivantes :
–  la Moucharaka Tabita :  les parties  demeurent partenaires jusqu’à l’expiration du contrat les liant ;
– la Moucharaka Moutanakissa : la banque se retire progressivement du projet conformément aux stipulations du contrat.
Moudaraba :
Il s’agit de contrat mettant en relation une ou plusieurs banques participatives (Rab el Mal) qui fournissent le capital en numéraire et/ou en nature et un ou plusieurs entrepreneurs (Moudarib) qui fournissent leur travail en vue de réaliser un projet. La responsabilité de la gestion du projet incombe entièrement aux entrepreneur(s). Les bénéfices réalisés sont partagés selon une répartition convenue entre les parties et les pertes sont assumées exclusivement par Rab el Mal, sauf en cas de fraude commise par le(s) Moudarib.
Notons enfin, que les caractéristiques techniques des produits des banques participatives ainsi que les modalités de leur présentation à la clientèle sont fixées par circulaire du wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit et avis conforme du Conseil Supérieur des Ouléma conformément aux dispositions de l’article 62 de la nouvelle loi.
Pour télécharger ou consulter le texte de la loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés Cliquez ici
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dimanche 1 mars 2015

Les exploitants agricoles : l'obligation déclarative

IS: la déclaration doit être déposée au plus tard le 31 mars 2015
IR:  la déclaration doit être déposée avant le 1er avril 2015
Les bénéfices agricoles font partie, comme les autres revenus, du revenu imposable. Ils sont soumis à des obligations déclaratives qui dépendent du régime d’imposition applicable. l’exonération fiscale accordée au secteur de l’agriculture, est maintenue uniquement au profit de la moyenne et la petite agriculture.
Les exploitations agricoles soumises à l’IS
Les exploitations agricoles soumises à l’IS qui réalisent un CA annuel supérieur ou égal à 35.000.000 de dirhams, doivent adresser à l’inspecteur des impôts du lieu de leur siège social ou de leur principal établissement au Maroc, dans les 3 mois qui suivent la date de la clôture de chaque exercice  comptable, une déclaration du résultant fiscal dû  au titre de l’impôt sur les sociétés (IS) établie sur ou d’après un imprimé modèle de l’administration.
Les exploitations agricoles dont l’exercice comptable coïncide avec l’année civile:
La déclaration doit être déposée au plus tard le 31 mars 2015
A ce titre. elle sont tenues de verser  :
– le montant de l’IS dû au titre de l’exercice écoulé. (2014)
– le 1er acompte provisionnel afférent à l’exercice en cours (2015). Cet acompte est égal à 25 % du montant de l’IS dû au titre de l’exercice clos à compter du 1er janvier (2014)
A noter que le bénéfice agricole est imposé au taux réduit de 17,5 % pendant les 5 premiers exercices consécutifs à compter du 1er exercice d’imposition. Toutefois, pour celles qui sont exonérées de manière permanente ou temporaire de l’IS restent soumises à l’obligation de déposer la déclaration du résultat fiscal ou plus tard le 31 mars 2015.
Déclaration du revenu global au titre de l’impôt sur le revenu (IR) Revenu Agricole
Dépôt de la déclaration avant le 1er avril 2015
Les exploitants agricoles (agrégateur ou éleveur de bétail) qui réalisent un chiffre d’affaire supérieur ou égale à 35.000.000 de dirhams, sont tenus de déposer une déclaration du revenu global, avant le 1er avril 2015, en ce qui concerne les revenus acquis à compter du 1er janvier 2014.
Toutefois, les exploitants agricoles sont dispensés du dépôt de cette déclaration s’ila réalisent un chiffre d’affaire supérieur ou égale à 35.000.000 dhs et ce pendant les 5 premiers exercices consécutifs, à compter du premier exercice d’imposition.
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Professions libérales : télédéclaration & télépaiement

En application des dispositions des articles 155 et 169  du code général des impôts, le Conseil de gouvernement réuni le 26 février 2015 a adopté le décret n° 2.15.97 qui dresse la liste des professions libérales concernées par la télédéclaration et le télépaiement des impôts et taxes.

La nouvelle liste, qui a été publiée au bulletin officiel du 2 avril 2015, vise les personnes physiques ou morales, qui exercent  des professions libérales dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 1.000 000 de dirhams hors taxe sur la valeur ajoutée ,qui doivent, par procédé électronique, déposer auprès de la direction générale des impôts les télédéclarations et effectuer les télépaiements, prévus en matière d’impôt sur les sociétés (IS), d’impôt sur le revenu (IR) et de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) :

Avocat, notaire, expert-comptable, comptable
Architectemétreur-vérificateur, géomètre, topographe, ingénieurs conseils, conseillers juridique et fiscal, conseils et expert en toute matière, coachs, décorateurs, assureurs, courtiers, courtiers ou intermédiaires d’assurances, interprètes, traducteurs.
Médecin, médecin en toute spécialité, exploitant des cliniques, maisons de santé ou traitement, masseur kinésithérapeute, exploitant de laboratoires d’analyses médicales et vétérinaire.

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Les coefficients de réévaluation à appliquer en 2015 en matière d'IR au titre des profits fonciers

Pour l’année 2018 CLIQUEZ ICI
L’arrêté du ministre de l’économie et des finances relatif aux coefficients de réévaluation de 2015 est publié au Bulletin Officiel du 2 mars 2015 à l’édition générale numéro 6339.

Ainsi, les coefficients des 15 dernières années :

L’annéeLe coefficient applicable
20141
20131.004
20121.023
20111.036
20101.044
20091.054
20081.089
20071.128
20061.152
20051.190
20041.201
20031.225
20021.236
20011.262
20001.274

Sources des données du tableau :

Arrêté du ministre de l’économie et des finances n° 562.15 du 05 joumada I 1435 (24 février 2015) fixant pour l’année 2015 les coefficients de réévaluation en ce qui concerne l’impôt sur le revenu au titre des profits immobiliers.

Pour prendre connaissance de l’intégralité du tableau tel qu’il est publié au bulletin officiel Cliquez ici

Bon à savoir :

L’arrêté ministériel en question émane du ministre de l’économie et de finances et fixe chaque année les coefficients de réévaluation en matière d’impôt sur le revenu au titre des profits fonciers conformément aux dispositions du code général des impôts institué par l’article 5 de la loi de finances n° 43-06 pour l’année budgétaire 2007 promulguée par le dahir n° 1-06-232 du 10 hija 1427 (31 décembre 2006),tel que modifié et complété, ainsi le décret n° 2-00-1045 du 20 rabi I 1422 (13 juin 2001) pris pour l’application de l’article 86 de la loi n° 17-89 relative à l’impôt général sur le revenu.

Pour apprendre plus sur l’application de ces coefficients, comme par exemple :
A quoi servent ces coefficients?
Comment calcule-t-on les profits fonciers ?
Exemples de calcul
Consulter notre billet de l’année 2013 ici

RM/ Blog de Droit Marocain

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